Les éditions Dervy, à l’origine de la parution de « La doctrine initiatique du Régime Écossais Rectifié en dix leçons essentielles » en septembre 2022, signalaient à juste titre, que cet ouvrage « met pour la première fois à la disposition des lecteurs, sous une forme claire et pédagogique », les clés de compréhension d’un « enseignement ésotérique, offrant des lumières singulières sur l’origine du monde matériel, la nature actuelle de l’homme et sa destination finale », dont est dépositaire le Régime Écossais Rectifié, à la suite de l’Ordre des élus coëns de Martinès de Pasqually. L’auteur revient ainsi dans cet entretien, sur la particularité de cette voie maçonnique et chevaleresque, et sur les perspectives providentielles qu’elle offre à toute âme désireuse d’en saisir le contenu et la substance initiatique et doctrinale.
Question 1 – La littérature maçonnique est très majoritairement dédiée à des considérations historiques ou, lorsque la préoccupation est de nature pédagogique, à des vade-mecum obédientiels, présentant des propositions d’explications fragmentées du langage symbolique. Vous optez pour une orientation différente, en positionnant la doctrine du Régime, comme récit fondateur de la vie initiatique. Ce choix implique-t-il une approche radicalement nouvelle de l’Apprentissage de la maçonnerie rectifiée, supposant une appropriation immédiate de cet enseignement ?
Il ne s’agit absolument pas d’un « choix », mais d’une orientation propre au Régime Écossais Rectifié lui-même, puisque ce système fut constitué, précisément, pour être le dépositaire d’un enseignement doctrinal que reçut Jean-Baptiste Willermoz lors de son admission, en avril 1767, dans « l’Ordre des Chevaliers Maçons élus coëns de l’Univers », et qu’il souhaita préserver en évitant qu’il ne se perde, en raison de la valeur de cette « doctrine », en utilisant le cadre formel de la Stricte Observance pour lui servir d’écrin protecteur. Le Régime Rectifié est donc né de cette volonté, et son essence est liée indissolublement, ce qui est un cas unique caractérisant son originalité, à la présence en son sein d’un dépôt « doctrinal ».
Ainsi, être fidèle aux volontés qui présidèrent à la fondation du Régime Écossais Rectifié, en plaçant la question de la « doctrine » au centre même de l’enjeu initiatique, ne constitue donc pas, comme on le constate, une quelconque décision innovante, mais un respect de ce qu’il en est de la nature authentique d’un Ordre qui, certes, en raison d’une pratique l’ayant ramené hélas ! à un « rite » parmi d’autres dans le cadre de structures obédientielles fonctionnant selon les formes administratives et organisationnelles de la maçonnerie andersonienne, a été mis à distance de ses propres critères référentiels, mais néanmoins qui depuis ses origines, c’est-à-dire le Convent des Gaules s’étant réuni à Lyon en 1778, s’est toujours pensé comme le « dépositaire » et le « gardien » de l’enseignement légué par Martinès de Pasqually à ses disciples, un « enseignement » qui remonte, selon le thaumaturge bordelais, au commencement des temps.
Cet enseignement ésotérique est d’ailleurs désigné du nom de « Sainte Doctrine » par Jean-Baptiste Willermoz, qui souligne qu’elle nous est « parvenue d’âge en âge par l’Initiation jusqu’à nous », rajoutant, pour que les choses soient bien claires dans l’esprit des membres du Régime Écossais Rectifié, de sorte que ne puisse subsister aucune ambigüité s’agissant de la provenance et du contenu de cette « Sainte Doctrine » en la regardant, fautivement, comme étant « fille de la raison humaine », qu’elle « n’est point un système hasardé arrangé comme tant d’autres suivant des opinions humaines ; elle remonte… jusqu’à Moïse qui la connut dans toute sa pureté et fut choisi par Dieu pour la faire connaître au petit nombre des initiés, qui furent les principaux chefs des grandes familles du Peuple élu, auxquels il reçut ordre de la transmettre pour en perpétuer la connaissance dans toute sa vérité […] [1].»
Question 2 – Cette « Sainte Doctrine » n’aurait-elle pas cependant la possibilité d’évoluer avec le temps, de modifier ses concepts en fonction des avancées de la pensée, voire de mettre en perspective certains points qui pourraient heurter trop frontalement les positions de l’Église, en particulier les affirmations tranchées portant sur les conditions « nécessaires » de la Création du monde ?
La suite du discours de Willermoz, que nous venons de citer, précisant que la doctrine « n’est point un système hasardé arrangé comme tant d’autres suivant des opinions humaines », est très instructif, car le patriarche lyonnais tient à insister sur un point relativement important – de nature à interdire toutes les velléités multiples pouvant surgir au fil du temps, qui chercheraient à « discuter », « amender », « opposer » ou « contrarier » les thèses de la doctrine dont l’Ordre est le dépositaire : « La forme de cette Instruction a quelquefois varié selon les temps et les circonstances, mais le fond, qui est invariable, est toujours resté le même [2].»
En conséquence cette « Sainte Doctrine », qui a pu prendre évidemment des formes différentes en fonction des périodes de l’Histoire, est cependant selon Willermoz de nature « invariante », ce qui signifie qu’elle n’a jamais changé du point de vue de son « fond » qui n’est pas sujet à devoir recevoir, par décision arbitraire, des révisions au gré du temps et des sensibilités de tout un chacun, afin de le faire correspondre à des opinions particulières, qu’elles soient théologiques, dogmatiques, ecclésiales ou philosophiques, ce « fond doctrinal » ne devant pas, et surtout ne pouvant pas, être modifié pour une raison qui est extrêmement simple à comprendre, c’est qu’en très peu de temps le legs willermozien, transformé et remanié au gré de croyances aussi diverses que variées, interprété selon des vues personnelles subjectives, voire modifié pour obéir à des interprétations fantaisistes, aboutirait à quelque chose de tout autre que ce qu’il est, et finalement, à très court terme, disparaîtrait.
Il convient donc, pour éviter que de telles initiatives, viennent à corrompre la substance de la doctrine du Régime, et rendre incompréhensibles la symbolique, l’architecture et le contenu même des « instructions » relatives à chaque grade, en s’autorisant à des modifications dans les thèses de cet enseignement, ou en se lançant, par des arguties et des procédés dilatoires, dans des interprétations faussées, biaisées et erronées, que soit rappelée cette vérité exprimée par Willermoz : « la doctrine a été transmise de temps immémorial par une tradition orale qui a traversé les siècles, appuyée sur de bons témoignages […] parmi ceux qui la reçoivent d’une manière suffisante à leur instruction personnelle, il y en a bien peu qui deviennent en état de la vouloir distribuer aux autres comme il faut, car c’est l’effet d’une disposition et d’une vocation particulière [3] .»
Tout ceci oblige donc que cette « distribution », pour ceux qui en ont la « vocation particulière », ainsi qu’y insiste le fondateur de l’Ordre, soit réalisée « fidèlement », de sorte d’éviter absolument l’oubli, la déformation, ou pire encore, la complète disparition des thèses doctrinales de l’Ordre.
C’est pourquoi, le livre qui vient d’être publié, ayant pour titre « La doctrine initiatique du Régime Écossais Rectifié en dix leçons essentielles », n’a donc pas d’autre ambition, et d’autre but, en ce début de XXIe siècle où les enjeux pour la continuité des « voies » initiatiques afin qu’elles perdurent en fidélité sont considérables, que de répondre à cette nécessité de « préservation » et « transmission » du corpus doctrinal dont l’Ordre est le détenteur depuis le XVIIIe siècle, de façon à ce que puisse se poursuivre l’œuvre métaphysique et initiatique dévolue par Willermoz au système maçonnique et chevaleresque qui a succédé, comme témoin du « Haut et Saint Ordre » – au moment où il s’effaçait de la scène de l’Histoire pour des motifs multiples dont seule la divine Providence possède véritablement les raisons [4] -, à « l’Ordre des Chevaliers Maçons élus coëns de l’Univers ».
Question 3 – Comme vous l’indiquez en introduction à la « première leçon », la singularité du Régime Écossais Rectifié est telle, qu’elle en finit par questionner son lien réel avec l’environnement maçonnique classique. La maçonnerie rectifiée présente les contours d’une théosophie active, là où d’autres systèmes initiatiques, fondent leur légendaire sur l’art de bâtir. Quelles sont les conséquences anthropologiques de cette forte singularité, pour les âmes engagées dans un tel cheminement ?
Les conséquences sont radicales, et portent non sur un « perfectionnement » de l’homme, mais une perspective qui n’est autre que sa « réintégration », selon la formule consacrée, dans sa « première propriété, vertu et puissance spirituelle divine », une « réintégration » qui est évidemment envisagée dans la région divine dont il provient, ce qui, on l’avouera aisément, change complètement de plan « l’horizon » initiatique.
Ainsi, d’une horizontalité humaine travaillant à des progrès au niveau de la sphère matérielle, le Régime Rectifié fait lui passer le champ « opérationnel », si l’on peut dire, vers une verticalité immédiate à visée divine, et cela transforme du tout au tout, et entièrement pour le moins, l’orientation de l’initiation en mode maçonnique, représentant d’ailleurs, il n’est pas inutile de le signaler, une forme assez originale de « voie » en quelque sorte « sacerdotale », puisque le frère reçu dans l’Ordre, aura à accomplir à un certain grade – en un mode symbolique particulier qu’on laissera à chacun le soin de découvrir le temps venu -, des gestes réservés normalement à la classe qui avait pour devoir le service du Sanctuaire dans l’Ancienne Alliance ; chemin de remontée donc, possédant par ailleurs une visée « réconciliatrice », ceci afin de ramener « l’âme de désir » dans « l’unité perdue » depuis la rupture adamique, avec l’Être éternel et infini.
Dire que ce changement de plan, très différent effectivement de ce que l’on rencontre dans d’autres rites, soit simple et aisé à mettre en œuvre serait sans doute mentir, car il faut admettre, avec sincérité, que le cheminement proposé par le Régime Écossais Rectifié est extrêmement délicat et fort subtil, nécessitant une rigueur spécifique bien supérieure à celle qui est généralement requise dans la pratique des autres systèmes. Il convient d’insister sur cet aspect de différence d’exigence bien plus qu’on ne le fait généralement.
On comprend de ce fait la raison de l’importance d’une parfaite assimilation des fondements métaphysiques et doctrinaux du Régime, de sorte de ne pas se méprendre sur le sens d’une « présence » en son sein, en se trompant de chemin ou en substituant des objectifs étrangers à ceux fixés explicitement par l’Ordre, « objectifs » qui sont pourtant clairement dévoilés, « pour ceux qui ont des oreilles pour entendre et des yeux pour voir » [5], dans les différentes « instructions » destinées à chaque grade, ou même – ce qui est très souvent le cas lorsque l’on ne pratique pas ce système selon les critères précis qui sont les siens -, de n’en point suivre aucun, bien qu’en étant « administrativement », pour ne pas dire « virtuellement », rattaché au Rite Rectifié, ce qui au fond ne signifie pas grand chose, faute d’avoir abordé les connaissances suffisantes pour en accomplir la finalité à son niveau spirituel authentique.
Question 4 – L’argumentaire récurrent des sensibilités hostiles aux éléments de la « doctrine de la réintégration », est d’en nier la présence au sein des classes symbolique et chevaleresque, pour la réserver aux dernières Instructions willermoziennes, actives au XVIIIème siècle. Cette posture ne revient-elle pas, objectivement, à séparer cet enseignement du réel, dans un système qui considère pourtant les formes manifestées, à la fois comme la conséquence d’un drame cosmogonique, et le lieu d’une possible réparation ? Le récit fondateur serait-il à distinguer de la vie du maçon rectifié ?
Poser la question c’est y répondre. J’ai d’ailleurs fait justice de ces assertions, visant à soutenir que la doctrine ne devrait pas être abordée dans les classes symboliques pour ne pas « troubler » les frères des premiers grades. On se demande donc bien en ce cas, aucun grade étant exempt d’éléments doctrinaux, quand doit-elle être abordée ?
Tout est imprégné de la « doctrine » au Régime Rectifié, et avant même d’avoir été reçu franc-maçon, lorsque le candidat séjourne en « chambre de préparation », des notions éminemment doctrinales sont exposées devant un « profane » à qui l’on déclare – ce qui pour les partisans d’une mise à l’écart de la doctrine dans les grades bleus est la preuve que leur position est dénuée de cohérence -, que s’il se trouvait que le récipiendaire avait une « doctrine opposée » à celle que l’Ordre regarde comme étant sa « règle fondamentale », il ne pourrait être admis en loge :
« […] l’Ordre, ne devant pas accueillir des individus qui auraient une doctrine opposée à celle qu’il regarde comme sa règle fondamentale a dû, relativement à ceux qui désirent d’y être admis, établir des formes certaines pour connaître leurs vrais sentiments, et leurs conformités avec ses lois, afin d’éloigner de ses assemblées tout prétexte de disputes ou d’oppositions d’opinions tendant à détruire la charité, la fraternité et l’union qui doit y régner essentiellement [6]. »
On perçoit évidemment le caractère absurde consistant à délivrer des propos à un impétrant qui se présente à la porte du temple, alors-même que celui qui les prononce, en prenant un air d’autorité pour ce faire, est en fait ignorant, ainsi que ceux qui sont en loge à ce moment-là et qui l’envoient auprès du candidat pour s’assurer de ses bonnes dispositions, de ce que représente la dite « doctrine » qui est qualifiée de « règle fondamentale » de l’Ordre.
Soit on accomplit une « scène » qui relève du théâtre de représentation en récitant des textes sans les comprendre comme pourraient le faire des acteurs de comédie, soit, au contraire, on considère que l’enjeu de ce qui est mis en œuvre est réellement initiatique, et alors il est impossible de se satisfaire d’une vague connaissance des notions doctrinales du Régime Rectifié en se disant qu’on les étudiera lorsqu’on en aura l’occasion, où lorsque le temps sera venu, l’expérience montrant que c’est immédiatement, dès l’agrégation à l’Ordre, que l’étude doit s’accomplir.
D’ailleurs, comme si cela ne suffisait pas dans l’exemple évoqué du récipiendaire découvrant la particularité du Régime, le candidat, toujours encore placé en chambre de préparation, c’est-à-dire en mesure de décider de refuser l’éventualité de sa réception et quitter les lieux, entendra qui plus est des affirmations appuyées sur quelques points hautement doctrinaux s’il en est, dont cette déclaration portant sur l’identité de « nature » entre son âme et celle de Dieu :
« […] votre âme immortelle est par conséquent de la même nature de cet Être immortel son Créateur, laquelle éloignée de cette source divine brûle d’une soif ardente dans la recherche de sa félicité qu’elle ne peut trouver ailleurs qu’à la source même…[7]. »
Il faut mesurer ce qu’une telle assertion signifie dans un cadre théologique et métaphysique, en sachant que soutenir « l’identité de nature » entre l’âme et le Créateur participe de thèses « émanatistes », bien connues des censeurs ecclésiastiques, qui depuis toujours, toutes confessions chrétiennes confondues issues des articles fixés lors des premiers conciles, se sont opposés vigoureusement à ces propositions jugées « hétérodoxes ».
Et contrairement à ce que l’on pourrait supposer, pour en éviter l’évidence et chercher à en fuir l’aveu de la manifeste présence, la thèse de « l’émanation de l’âme », de façon plus encore explicite, est signifiée de façon claire dans la « Règle Maçonnique », qui sera remise au nouvel Apprenti après sa réception.
Il suffit de lire avec attention :
« Homme ! Roi du monde ! Chef-d’œuvre de la création lorsque Dieu l’anima de son souffle ! médite ta sublime destination. Tout ce qui végète autour de toi, et n’a qu’une vie animale, périt avec le temps, et est soumis à son empire : ton âme immortelle seule, émanée du sein de la Divinité, survit aux choses matérielles et ne périra point. Voilà ton vrai titre de noblesse… [8].»
On l’aura compris, il n’y a aucun moyen d’échapper à ce climat « doctrinal » qui imprègne l’ensemble de l’architecture du Régime Rectifié en ses différents grades, et ce depuis les tout premiers instants d’arrivée en son sein. Jean-Baptiste Willermoz, qui a édifié savamment, avec une patience infinie et un génie admirable ce système, voulut qu’il en soit ainsi. Il faut donc ainsi que cela soit, et demeure comme tel, si l’on souhaite respecter les vœux du patriarche lyonnais qui présidèrent à l’édification de l’Ordre.
Question 5 – Retrouve-t-on, de manière concrète, les éléments du récit fondateur martinésien, dans les différentes séquences des rituels rectifiés – en particulier, dans l’ouverture et l’ordonnancement de la loge, ou dans la cérémonie de Réception, qui sont les temps forts du rite – ?
Il conviendrait normalement de se contenter de répondre, pour ne pas enfreindre la règle de discrétion relative à tout ce qui participe du déroulement cérémoniel en loge, simplement par l’affirmative à cette interrogation et rester ensuite silencieux pour le reste [9].
Sachons toutefois que Willermoz a effectué, avec une rare précision, un travail de transposition méticuleux entre les élus coëns et le Régime Rectifié, de sorte que chaque geste, chaque batterie, chaque couleur, chaque symbole, relève d’une référence martinésienne. C’est d’ailleurs au titre de la mission de rédaction des rituels qui lui avait été confiée par le « Convent de Wilhelmsbad », qu’il put effectuer de manière méthodique cette transposition, ce qu’il rappela à Charles de Hesse, dans sa lettre du 10 septembre 1810, où il expliquait les conditions dans lesquelles il entreprit l’édification du 4ème grade : « Votre Altesse se rappelle sans doute que le temps que les députés au Convent Général pouvaient accorder pour la durée de cette assemblée étant insuffisant pour perfectionner la multitude des travaux projetés, on s’occupa d’abord des plus importants ; on se borna ensuite à esquisser la réforme des grades symboliques et des deux de l’Ordre Intérieur […] Les bases du quatrième grade furent aussi arrêtées, et Votre Altesse me confia personnellement les instructions et l’esquisse du tableau […] le tout écrit de sa propre main et adopté par le Convent pour me diriger dans cette partie du travail [10].»
*
Il n’en demeure pas moins, pour en rester au simple cadre général, sans rentrer trop avant dans des détails touchant aux rituels, que les thèmes du « récit martinésien », en « six temps », sont tout-à-fait perceptibles dans les différents épisodes : « émanation », « émancipation », « prévarication », « dégradation », « expiation » « réconciliation », le septième temps devant être celui de « réintégration », correspondant au retour à l’état initial, « six temps » que l’on retrouve dans le cheminement initiatique, la réception en Apprenti pouvant être regardée comme une reproduction de la « chute d’Adam » et les premiers pas vers sa « réconciliation ».
Ainsi, l’ordonnancement de la séquence de l’ouverture des travaux lors de l’activation des « lumières d’ordre » – qui répond aux « six jours de la création », en se souvenant que les trois éléments ou « essences spiritueuses », et non quatre, « l’air » étant exclu, que reconnaît le Rectifié, soit « Feu », « Eau » et « Terre » -, est la manifestation du « Verbe ternaire de création » », car Dieu, en décidant, sous l’effet d’une « contrainte », de la constitution du monde, donna l’ordre de sa production par « 6 pensées divines ». Les « images de formes corporelles apparentes » sont donc manifestées à l’ouverture des travaux par l’opération de génération de la manière suivante : 1+2+3 = 6 [11], l’allumage des six lumières d’ordre pouvant être regardé comme une « manifestation du Verbe de création » [12], ce que représente concrètement l’éclairage de la Loge par le Vénérable Maître et les Officiers, reproduisant ainsi le « double triangle » fondateur de « l’univers physique » :
La « manifestation du Verbe de création », à partir du « Chandelier emblème de la triple puissance du Grand Architecte de l’Univers» placé sur l’autel du Vénérable Maître, provient bien de la « Pensée » (1), est générée par la « Volonté » (2), et s’accomplit par « l’Action », la mise en œuvre de l’opération de « création », telle que voulut la réaliser rituellement Willermoz, par le déploiement de la lumière provenant de la puissance du ternaire (3), produit, par la même puissance arithmosophique de ce ternaire 1+2+3, la forme générale sénaire de l’univers physique (6) [13] qui est un « double triangle », dont la loge est constituée et qu’elle représente symboliquement et spirituellement [14].
On pourrait de la même manière, développer bien plus encore en d’innombrables points et les différents grades, les correspondances entre sources martinésiennes et rituels rectifiés, invitant ceux qui souhaitent approfondir sérieusement le sujet, passionnant à bien des égards pour la juste compréhension de la nature du système élaboré par Willermoz, dans livre publié sur ce thème : « Les élus coëns et le Régime Écossais Rectifié » [15].
Question 6 – Vous indiquez, en conclusion de l’ouvrage, que « le but de Willermoz fut de préserver la doctrine de Martinès de Pasqually […] quand sombrait l’ordre des Élus Coëns. » Si les éléments du récit imprègnent les rituels rectifiés, pourquoi ne pas en avoir conservé les formes et l’architecture ?
Tout simplement parce que les formes et l’architecture du système édifié par Martinès de Pasqually, étaient quasi impraticables, et d’ailleurs ne furent jamais pratiquées conformément aux textes qui avaient pour fonction d’organiser et légiférer la vie des élus coëns, en particulier les « Statuts Généraux » de 1767, d’une impressionnante complexité baroque, et dont une rapide lecture fait immédiatement comprendre les raisons objectives de ce caractère quasiment impraticable.
Mais d’autres facteurs ont joué un rôle dans cette décision de Willermoz. Tout d’abord le départ précipité de France, laissant l’Ordre des élus coëns dans un état de profonde désorganisation, et la disparition, dans des circonstances troubles, de Martinès de Pasqually à Port-au-Prince en septembre 1774. Événements suivis de la mise en sommeil officielle de l’Ordre par son dernier Grand Souverain avant même la Révolution, sans minorer le fait par ailleurs, que le patriarche lyonnais ne fut jamais vraiment gratifié par les « opérations » qu’il regardait, plus le temps avançait depuis sa rencontre avec Martinès, avec une certaine suspicion teintée d’une grande réserve, renforcée par la manière assez hasardeuse et la liberté fantaisiste avec laquelle Pasqually décidait du contenu des rituels et des périodes de leur célébration, rédigeant les cérémonies en puisant selon son inspiration du moment dans des sources où figurent en bonne place les opuscules magiques de Cornelius Agrippa, l’Enchiridion attribué au pape Léon III, et surtout l’Heptameronde Pierre d’Abano, qui mêlent magie invocatoire, culte de théurgie active incluant des « exconjurations » contre les démons, fumigations de résines psychotropes, sacrifices de matières animales, sciences divinatoires, etc., et qui servirent à la rédaction du répertoire contenant les noms et les hiéroglyphes secrets des « 2400 noms » d’esprits à « invoquer » lors des rituels destinés aux émules, l’amenant au final à considérer que si la doctrine avait un intérêt réel, et tel était bien le cas en effet, les formes cérémonielles des élus coëns en revanche, lui apparaissaient plus que problématiques, et pouvaient en conséquence être avantageusement écartées.
Tout ceci explique donc pourquoi Willermoz jugeât préférable d’utiliser les formes toutes germaniques de l’organisation rigoureuse de la « Stricte Observance », et ses éléments rituels, autrement plus solides et stables que l’Ordre disparu, selon les vues de la Divine Providence, des élus coëns, pour y introduire, afin qu’il perdure à travers les âges et soit conservé, l’enseignement initiatique d’une valeur incomparable, portant sur la « réintégration des êtres dans leur première propriété, vertu et puissance spirituelle divine ».
Question 7 – La doctrine du Régime Rectifié, référée, selon l’expression maistrienne, à un « christianisme transcendant » et primitif [16], qui fut celui d’Origène et du néo-platonisme, diffère, sur des points majeurs – tels que l’immatérialisme des premiers esprits, le caractère « nécessaire » et contraint du composé matériel, consécutif à leur révolte, et sa vocation finale à l’anéantissement – des définitions dogmatiques, telles qu’admises par l’ensemble des institutions ecclésiales de la chrétienté. N’y aurait-il pas alors une forme de paradoxe, à concilier une vie liturgique chrétienne, avec une adhésion active et participative à ces thèses ? Les deux propositions ne sont-elles pas antagonistes ?
Il y aurait un paradoxe, effectivement, si l’on considérait que la participation à la vie liturgique impose une adhésion pleine et entière au corpus dogmatique de l’Église entendue au sens large, corpus fixé lors des conciles, et qu’une distance en plusieurs points non négligeables, il faut en convenir, et que vous rappelez à juste raison, représentait une impossibilité d’assistance aux offices.
Or on peut très bien – et il est même bon de le faire si l’on peut bénéficier dans la paroisse de son quartier ou de son village, de formes cultuelles traditionnelles -, en adhérant aux thèses de la doctrine enseignée par l’Ordre, être fidèle à la vie liturgique de la confession chrétienne à laquelle on appartient, et en suivre le calendrier en participant au culte célébré par le clergé ou les pasteurs, en ne cherchant surtout pas à engager des controverses théologiques, mais en occupant une place, humble et discrète, de sorte de simplement « communier en esprit » avec le Ciel, au milieu de nos sœurs et frères en chrétienté.
Le « christianisme transcendant » auquel se réfère Joseph de Maistre, désignant sous cet intitulé les thèses originales qu’il avait rencontrées auprès des initiés à Lyon, n’a pas à se constituer en une nouvelle Église, ce qui serait incohérent pour une orientation spirituelle toute céleste et qui a son séjour dans l’invisible, ce « christianisme » étant transversal de toutes les expressions confessionnelles, et n’encourageant ainsi personne, bien au contraire, à changer de chapelle, chacun ayant à vivre et accomplir, là où il se trouve providentiellement placé, son pèlerinage terrestre.
Il importe de comprendre que ce « christianisme transcendant » n’est pas une nouvelle religion, mais désigne les « lumières supplémentaires » éclairant le Credo selon l’expression de Maistre, participant de la « discipline de l’Arcane », ou tradition secrète, qui provient des premiers siècles du christianisme, dont parle saint Clément d’Alexandrie dans son « Gnostique » et que Fénelon décrit ainsi :
« La gnose, selon saint Clément, n’est point l’état des chrétiens ordinaires qui ont reçu la foi et la grâce de Dieu dans le baptême ; c’est quelque chose de bien plus pur et de plus sublime. À la vérité, ce n’est rien de distingué du christianisme ; mais c’est le comble de la perfection du christianisme où un petit nombre d’âmes est élevé […] il y a dans la gnose, outre les vertus sublimes que saint Clément y dépeint, un fond caché, un profond mystère, qu’il n’est pas permis de dévoiler, et qui demande la même économie que les mystères fondamentaux du christianisme. La gnose est au-dessus de l’état de foi ordinaire des justes ordinaires, comme la foi des justes ordinaires est au-dessus de la sagesse des philosophes païens. Voilà sans doute un état bien digne d’attention ; et le secret avec lequel il est voilé doit bien encore redoubler notre zèle pour l’approfondir [17]. »
Ainsi chaque membre du Régime Rectifié, nourri de l’enseignement d’une « doctrine » qui prend son origine dans les vérités du christianisme primitif et que l’institution ecclésiale a connues, avant de les combattre et les qualifier « d’hérésies » à partir du VIe siècle [18], peut donc se tranquilliser en considérant avec Joseph de Maistre, catholique s’il en est, que les dogmes « cachent » plus qu’ils ne protègent la vérité :
« Le christianisme, dans les premiers temps, était une vraie initiation où l’on dévoilait une véritable magie divine […] Bien loin que les premiers symboles contiennent l’énoncé de tous nos dogmes, les chrétiens d’alors auraient au contraire regardé comme un grand crime de les énoncer tous. Il en est de même des saintes Écritures : jamais il n’y eut d’idée plus creuse que celle d’y chercher la totalité des dogmes chrétiens : il n’y a pas une ligne dans ces écrits qui déclare, qui laisse seulement apercevoir le projet d’en faire un code ou une déclaration dogmatique de tous les articles de foi […] jamais l’Église n’a cherché à écrire ses dogmes ; toujours on l’y a forcée. La foi, si la sophistique opposition ne l’avait jamais forcée d’écrire, serait mille fois plus angélique : elle pleure sur ces décisions que la révolte lui arracha […] le Christ n’a pas laissé un seul écrit « à ses Apôtres. Au lieu de livres il leur « promit le Saint-Esprit. ‘‘C’est lui, leur dit-il, qui vous inspirera ce que vous aurez à dire’’ [19].»
Pensons donc en conséquence, que la « grande affaire » comme aimait à désigner Louis-Claude de Saint-Martin « l’initiation », pour les êtres cheminant sur les sentiers de la remontée vers les régions de l’invisible au sein du Régime Rectifié, n’est autre que de réaliser leur « unité » avec « l’Être éternel et infini », en se tenant éloignés des controverses « dogmatiques » absolument inutiles, de sorte d’accomplir ce pourquoi ils existent, c’est-à-dire, en tant que « fils de la lumière », manifester la vie du « Principe » ou « Agent suprême » :
« L’homme n’existe que pour prouver qu’il y a un Agent suprême et démontrer, par sa propre lumière, au milieu des ténèbres de la création, l’existence de cet Agent suprême, ainsi que d’en convaincre tous ceux qui auraient voulu et voudraient la méconnaître [20]. »
Résonneront alors avec un sens singulièrement profond pour celui qui se sera approché, « en Esprit et en Vérité » (Jean IV, 24) de « l’Agent Suprême », imprégné de la « doctrine initiatique » qui lui aura permis de nourrir sa « connaissance » des mystères divins en déchirant le « voile » qui lui en dissimulait les « vérité » [21], les paroles délivrées au candidat lors de la réception du premier rayon de lumière :
« Mes Frères que la Joie règne désormais parmi nous. Le Fils de la Lumière s’était égaré dans les Ténèbres, il a été rappelé, il a été ramené, ses yeux ont été ouverts et les ténèbres se sont dissipées ! [22]»
Éditions Dervy, 2022, 296 pages, 24 €.
Notes.
[1] J.-B. Willermoz, ms 5475 pièce 2, Bibliothèque Municipale de Lyon.
[2] Ibid.
[3] J.-B. Willermoz, Lettre à la Triple Union de Marseille, 1807 (« article secret à ma lettre du 1er septembre 1807 »), [° 173], BNF, fm 292.
[4] Sur ces questions, portant sur les liens profonds qui unissent historiquement, symboliquement et doctrinalement le « Régime Écossais Rectifié » et « l’Ordre des Chevaliers Maçons élus coëns de l’Univers », on se reportera avec profit à l’étude récemment publiée consacrée au sujet : J.-M. Vivenza, Martinès de Pasqually et Jean-Baptiste Willermoz, Vie, doctrine et pratiques théurgiques de l’Ordre des Chevaliers Maçons Élus Coëns de l’Univers, Le Mercure Dauphinois, 2020.
[5] « Mais heureux sont vos yeux, parce qu’ils voient, et vos oreilles, parce qu’elles entendent ! » (Matthieu XIII, 16).
[6] Rituel du Grade d’Apprenti, Régime Écossais Rectifié, 1802, B.N.F., Ms. 512-541.
[7] Rituel du Grade d’Apprenti, Régime Écossais Rectifié, 1802, op.cit.
[8] Règle Maçonnique, op.cit., Art. II, § I, « Immortalité de l’âme ».
[9] Pour rappel : « ……..Je m’engage sur ma parole d’honneur, devant cette respectable assemblée […] de ne jamais révéler aucun des mystères, secrets et symboles de la Franc-maçonnerie, de quelque manière que ce puisse être, et de n’en parler à aucun homme que je n’aurai pas reconnu pour un vrai et fidèle maçon…» (Cf. « Formule de l’engagement des Apprentis », Rituel du Grade d’Apprenti, Régime Écossais Rectifié, 1802, op.cit.).
[10] Cf. J.-B. Willermoz, Lettre à Son Altesse Sérénissime le Prince Charles de Hesse-Cassel, in É. Dermenghem, Jean-Baptiste Willermoz (1730-1824), Les Sommeils, Paris, La Connaissance, 1926, p. 175-176.
[11] « Le nombre sénaire est celui par lequel le Créateur fit sortir de sa pensée toutes espèces d’images de formes corporelles apparentes qui subsistent dans le cercle universel. La Genèse n’enseigne-t-elle pas que Dieu a tout créé dans six jours ? […] Par ce même nombre, le Créateur fait sentir à sa créature, tant spirituelle que corporelle, la durée du temps que doit subsister la création universelle. Voilà quelle est la vertu du nombre sénaire et l’emploi que le Créateur en a fait. C’est par là que les sages ont acquis la connaissance du principe des formes et des bornes que le Créateur a mises à la durée de leur cours temporel et passif. C’est encore de là que nous apprenons que tout être corporel se réintégrera dans son premier principe d’émanation par le même nombre qui l’a produit. » (Traité, § 100).
[12] « Dès qu’il eut conçu d’opérer cet univers physique de matière apparente, le plan s’en présenta à son imagination divine, sous la forme d’un triangle équilatéral qu’il fit descendre en présence des esprits mineurs ternaires, auxquels il donna l’ordre de l’exécuter, en faisant usage des facultés qu’ils avaient innées en eux et suivant le plan qu’il leur présentait, au centre duquel était son Verbe ternaire que nous reconnaissons être le principe de la réaction universelle. » (Les Leçons de Lyon, n° 111).
[13] « Les six circonférences, les six jours de la création, les six pensées du Créateur par l’addition mystérieuse de la pensée, volonté et action. » (Les Leçons de Lyon, n° 113).
[14] « Nous disons que cet univers physique fut créé par le nombre sénaire que Moïse présente mystérieusement dans la Genèse sous l’image de six jours ; nombre dont nous sentons la justesse par la jonction du double triangle, car le véhicule inséré par les esprits de l’axe [feu central] dans chacune des trois essences fondamentales étant une émanation d’eux-mêmes et de leur propre essence était bien un principe d’action ternaire et de vie dans les corps, formant le triangle inférieur corporel et passif. Mais cette vie aurait resté comme nulle et sans mouvement, si elle n’eût été vivifiée elle-même par un principe supérieur aux êtres qui l’avaient insérée. C’est l’action de cet être supérieur sur le principe de vie passive qui a opéré cette vivification indispensable pour la vie et l’entretien des corps ; elle doit donc porter aussi avec elle son nombre ternaire particulier, puisqu’elle agit sur un nombre ternaire qu’elle embrasse complètement. Or, la réunion de ces deux ternaires forme bien le nombre sénaire qui a opéré la facture de cet univers physique et qui entretient la vie de tous les êtres corporels qui y sont renfermés ; ce qui nous est représenté par la jonction des deux triangles équilatéraux, dont l’un supérieur actif opère sans cesse la réaction de l’inférieur passif. C’est pourquoi nous donnons le nombre 3 aux esprits de l’axe producteur des principes corporels, ou essences fondamentales, et que nous donnons le nombre 6 aux esprits chargés par le Créateur d’entretenir la vie des corps, puisque ceux-ci participent à l’action des premiers, en réactionnant sans cesse sur le principe de vie qu’ils ont inséré dans les corps. » (Les Leçons de Lyon, n° 111)
[15] Les élus coëns et le Régime Écossais Rectifié, de l’influence de la doctrine de Martinès de Pasqually sur Jean-Baptiste Willermoz, Le Mercure Dauphinois, 2010.
[16] Joseph de Maistre, Quatre chapitres inédits sur la Russie, Paris, Librairie Auguste Vaton, 1859.
[17] Fénelon, Le Gnostique de saint Clément d’Alexandrie, in P. Dudon, Gabriel Beauchesne, 1930, p. 164-165.
[18] « Toutes ces choses desquelles dérive un sentiment profond d’amour et de confiance, de crainte et de respect, et de vive reconnaissance de la créature pour son Créateur, ont été parfaitement connues des chefs de l’Église pendant les quatre ou six premiers siècles du christianisme. Mais depuis lors, elles se sont successivement perdues et effacées à un tel point qu’aujourd’hui […] les ministres de la religion traitent de novateurs tous ceux qui en soutiennent la vérité. » (J.-B. Willermoz, Lettre à Frédéric-Rodolphe Saltzmann, 3-12 mai 1812, éditée par et R. et C. Amadou in Renaissance Traditionnelle, n° 147-148, 2006, p. 202-203)
[19] J. de Maistre, Essai sur le Principe Générateur des constitutions politiques, § 15, P. Russand, Lyon, 1833, pp. 18-20 ; 22-23 ; 28. Robert Amadou prononça sur le sujet de la distance du Régime Rectifié vis-à-vis des « dogmes » – et leur soi-disant caractère « intangible » (sic) qui s’imposerait d’autorité à une doctrine de l’Ordre qui elle ne serait pas dotée de ce critère d’intangibilité -, quelques paroles qui pourraient être utilement méditées par certains : « Au sein du Régime Rectifié, le Verbe exprime l’essence du Logos qui s’exprime à son tour dans l’univers, l’univers exprimant toutes choses suivant le mode qui revient à chacune essentiellement. Sans début ni eschatologie. Le Verbe porte l’expression-langage ; l’Univers est l’expression de cette expression, expression-figure ou physionomie (ce thème classique d’une double expression se retrouve chez Eckhart, Dieu-Natura Naturata, s’exprime dans le Verbe, parole intérieure et silencieuse par essence), le Verbe s’exprime ainsi dans le monde en dehors de tous dogmes. En cela le Rectifié échappe aux dogmes et religions. » (Cf. Robert Amadou, i.O. Ab Aegypto, Conférence, Genève 1989).
[20] Leçons de Lyon, n° 114.
[21] « Ce voile déchiré est le véritable type de la délivrance du mineur privé de la présence du Créateur. Il explique la réintégration de la matière apparente, qui voile et sépare tout être mineur de la connaissance parfaite de toutes les œuvres considérables qu’opère à chaque instant le Créateur pour sa plus grande gloire. Il explique le déchirement et la descente des sept cieux planétaires, qui voilent, par leur corps de matière, aux mineurs spirituels la grande lumière divine qui règne dans le surcéleste. Il explique encore la rupture de celui qui cachait et voilait à la plus grande partie des mineurs la connaissance des œuvres que le Créateur opère pour sa plus grande justice en faveur de sa créature. (Traité § 94).
[22] Rituel du Grade d’Apprenti, Régime Écossais Rectifié, 1802, op.cit.