Régime Écossais Rectifié

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Le symbolisme du Phénix en littérature au XVIIIe siècle

In Littérature, Philosophie, Symbolisme on 5 janvier 2013 at 16:13

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Jean-Pierre Claris de Florian (1755-1794)

Le Phénix

Le phénix, venant d’Arabie, 
Dans nos bois parut un beau jour : 
Grand bruit chez les oiseaux ; leur troupe réunie 
Vole pour lui faire sa cour. 

Chacun l’observe, l’examine ; 
Son plumage, sa voix, son chant mélodieux, 
Tout est beauté, grâce divine, 
Tout charme l’oreille et les yeux.

 
Pour la première fois on vit céder l’envie 
Au besoin de louer et d’aimer son vainqueur. 
Le rossignol disait : jamais tant de douceur 
N’enchanta mon âme ravie.

 
Jamais, disait le paon, de plus belles couleurs 
N’ont eu cet éclat que j’admire ; 
Il éblouit mes yeux et toujours les attire. 
Les autres répétaient ces éloges flatteurs, 
Vantaient le privilège unique 
De ce roi des oiseaux, de cet enfant du ciel, 
Qui, vieux, sur un bûcher de cèdre aromatique, 
Se consume lui-même, et renaît immortel. 

Pendant tous ces discours la seule tourterelle 
Sans rien dire fit un soupir. 
Son époux, la poussant de l’aile, 
Lui demande d’où peut venir 
Sa rêverie et sa tristesse : 
De cet heureux oiseau désires-tu le sort ? 
– Moi ! Mon ami, je le plains fort ; 
Il est le seul de son espèce.

Jean-Pierre Claris de Florian, Fable XIII, Livre II, 1792.

Jean-Pierre Claris de Florian, auteur dramatique, romancier, poète et fabuliste français, né près de Sauve à Logrian, le 6 mars 1755 et mort à Sceaux le 13 septembre 1794, s’inspira de la Bible pour écrire un poème narratif, Tobie, et une églogue, Ruth, récompensée par l’académie française en 1784. Florian écrivit un roman épique (Numa Pompilius) qui se voulait une réponse au Télémaque de Fénelon. Elu membre de l’Académie française en 1788 Contraint, en tant que noble, de quitter Paris lors de la Révolution française, il se réfugia à Sceaux. Il entreprit de traduire et d’adapter Le Don Quichotte de Cervantès. Arrêté en 1794, l’épître dédicatoire de Numa Pompilius qu’il avait écrite à la reine huit ans plus tôt, le desservant devant le Comité de sûreté générale, il fut remis en liberté le 27 juillet de la même année, mais il mourut subitement le 13 septembre, à l’âge de trente-neuf ans, probablement des suites de sa détention qui aggrava une tuberculose contractée depuis plusieurs années.

Il est enterré à Sceaux où sa tombe a été érigée en sanctuaire des Félibres, association culturelle et littéraire créée par Frédéric Mistral au milieu du XIXe siècle.